Notre alimentation

L’alimentation représente 25 à 50% de notre impact climatique[1]. C’est un secteur économique qui fait l’objet de nombreuses spéculations financières, où les intérêts sont immenses et les injustices le sont tout autant. Et c’est bien-sûr un secteur qui nous concerne tous, que ce soit en lien avec notre santé, notre bien-être, notre économie, notre environnement ou encore nos relations sociales.

Dans ce contexte, il peut sembler étonnant que les politiques publiques ne soient pas plus proactives. Nous avons une politique agricole, mais avons-nous une politique alimentaire ? Laisser faire la loi du marché, c’est abandonner le choix de notre alimentation à toutes et tous entre les mains de quelques actrices et acteurs qui dominent le marché et en particulier les multinationales de l’industrie agro-alimentaire ou autres géants de la grande distribution.

Les conséquences de cette absence de politique pro-active sont bien connues : souffrance des agricultrices et agriculteurs (un des métiers au plus fort taux de suicide), disparition progressive des exploitations agricoles (1’000 exploitations mettent la clé sous la porte chaque année en Suisse), destruction de la biodiversité, stérilisation des terres, changement climatique, malbouffe, qualité des eaux etc.

Ceci dit, l’alimentation, c’est aussi le secteur économique sur lequel nous pouvons avoir le plus d’impact direct en tant que consommatrice et consommateur. C’est un secteur où il est possible de se réapproprier localement toute une filière, de la production à la consommation en passant par la transformation, le conditionnement et la distribution.

C’est ainsi qu’à Genève et en Suisse romande de nombreuses initiatives indépendantes témoignent d’une volonté citoyenne dans ce domaine. Il s’agit en particulier des épiceries et petits supermarchés participatifs, dont une vingtaine a vu le jour en Suisse Romande depuis 2018[2].

Leurs objectifs sont divers : i) réduction de notre impact écologique ; ii) création de lien social ; iii) recherche d’une alimentation moins transformée, avec moins d’intrants chimiques ; iv) maintien d’une agriculture locale et diversifiée ; v) réduction des inégalités sociales ; vi) recherche d’une meilleure alimentation à meilleur prix ; vii) sensibilisation des mangeuses et mangeurs à toutes ces questions ; viii) invitation à devenir consom’ac.teur.trice…

Avec ces objectifs, ces nouvelles entreprises tentent de pallier au manque de politique publique claire dans le domaine de l’alimentation. Mais cette «vocation d’intérêt public» entraîne aussi des coûts qui sont, dans une économie libérale, généralement pris en charge par la collectivité.  Ajoutons à cela le fait que l’alimentation voit ses parts de marché en diminution constante par rapport à d’autres secteurs, dans toute l’Europe et particulièrement en Suisse (voir graphique ci-contre).

Dans ce contexte, nous pouvons déjà affirmer :

Dans un secteur agro-alimentaire soumis à forte concurrence et dominé en Suisse par un duopole à fort capital de sympathie, créer à Genève une nouvelle coopérative de distribution alimentaire plus respectueuse du climat, des personnes et de la nature n’aura de chances de réussir qu’avec un fort soutien des collectivités et des citoyen-ne-s.


[1]   Voir par exemple le dernier rapport du GIEC 2021 ou le livre “Hold-up sur le climat : Comment le système alimentaire est responsable du changement climatique et ce que nous pouvons faire.” éd. Cetim 2016.

[2]   Voir le no. 66 de La Revue Durable paru en 2021 et son dossier “Construire ensemble des circuits courts alimentaires”